Un décret gouvernemental pourrait bientôt légaliser ces « dark shops », utilisés par les plateformes de livraison express à domicile. Franceinfo répond à quatre questions pour comprendre pourquoi cette proposition est en discussion.

1Qu’est-ce que le « dark store » ?

Imaginez un supermarché dans lequel il n’y a pas de clients. Dans les « dark stores », les rayons sont remplis de produits du quotidien. Mais pas question de venir y faire vos courses, seule la livraison peut entrer. Ces dépanneurs fantômes sont créés dans les grandes villes par des plateformes de livraison à domicile telles que Cajoo, Flink, Uber Eats et Gorillas. Ces applications vous permettent de faire livrer vos courses rapidement. Riz, jus d’orange, steaks hachés, haricots verts ou shampoing… Un livreur passe par le “dark shop” pour récupérer les produits qu’il a commandés et les apporter au client directement en bas, le plus souvent en moins de 15 minutes, minutes . Pour répondre à ce défi de vitesse, ces surfaces sont placées dans les grandes villes ou leur proche banlieue, souvent au rez-de-chaussée d’immeubles à appartements. Selon la mairie de Paris, la capitale compte désormais une centaine de ces établissements, qui ont fleuri suite aux restrictions de déplacement visant à endiguer l’épidémie de Covid-19.

2 Pourquoi la mairie de Paris leur fait-elle la guerre ?

La plupart des « dark shops » s’installent illégalement à Paris. Pour créer ce type d’entrepôts de supermarchés, les plates-formes de livraison directe doivent théoriquement demander une autorisation. Mais en mars, 45 « dark shops » se sont installés illégalement dans la capitale, selon la mairie de Paris. Ils sont considérés par la mairie et les services d’urbanisme de Paris comme des entrepôts, alors que les espaces dans lesquels ils sont installés sont le plus souvent des espaces commerciaux. “Pour transformer un commerce en entrepôt, les acteurs du ‘fast trade’ auraient dû demander une autorisation”, expliquait en mars le premier adjoint à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire. Et la ville de Paris préfère garder les commerces que de voir ces entrepôts se multiplier. D’abord, parce que les « dark shops » créent des nuisances pour les habitants du quartier, qui sont dérangés par les allées et venues avec une livraison. Ensuite, parce que les espaces occupés par ces entrepôts sont autant d’espaces où les commerces ne peuvent pas être localisés. Enfin, le « commerce rapide » est utilisé par les clients au détriment de la consommation dans les magasins de proximité. “Les ‘dark shops’ concurrencent directement l’alimentation générale et les supermarchés, des petites formes d’alimentation de moins de 400 m2, analysait Pascal Madry, directeur de l’Institut de la ville et du commerce, auprès de franceinfo en mars. A Paris, les possibilités sont d’environ 150″ dark commerces”, et s’il arrivait, une centaine d’épiceries seraient directement menacées”.

3 Pourquoi la Mairie de Paris s’inquiète-t-elle de ce projet de décret ?

Un arrêté gouvernemental a retenu l’attention de la mairie de Paris. Emmanuel Grégoire, premier adjoint PS chargé de l’urbanisme, a fait part samedi de son “inquiétude” et de son “incompréhension” concernant “un projet de décret (…) qui légalise en fait les ‘dark shops’”. ⚠️ #Darkstore Nous découvrons avec beaucoup d’inquiétude et d’incompréhension un projet d’ordonnance DHUP qui légalise en réalité les dark stores. Un simple point de retrait suffira pour compter comme une 1/2 transaction @OliviaPolski @BGomes_75 pic.twitter.com/4omMOHmtg6 — Emmanuel Grégoire (@egregoire) 13 août 2022 L’ordonnance propose de considérer les « dark stores » comme des magasins normaux et non plus comme des entrepôts. Cette proposition limiterait ainsi les moyens légaux de la mairie de Paris pour lutter contre leur implantation. S’il est adopté, “un simple point de collecte suffira pour être considéré comme un commerce”, a assuré l’élu parisien sur Twitter. Elle demande au gouvernement de suspendre ce projet et de convoquer une réunion de travail spéciale à ce sujet avec France Urbaine (organisme qui regroupe toutes les métropoles, communautés urbaines, communautés urbaines et grandes villes de France) et les grandes villes concernées.

4 Pourquoi cette mesure n’est-elle pas encore définitive ?

Un projet d’arrêté et un projet d’arrêté sont en effet “en cours d’élaboration”, a précisé auprès de l’AFP le représentant du ministère auprès du ministre de la Transition écologique, chargé de la Ville et du Logement. “Oui, il faut réglementer les ‘dark shops’ et trouver l’équilibre entre la vitalité des centres-villes et l’emploi. C’est de cela qu’il s’agit dans ce projet !” a réagi le porte-parole du ministre de la ville, Olivier Klein, sur Twitter. Mais il précise que “ce texte est en consultation depuis juillet”. Oui, il faut réglementer les #darkshops et trouver l’équilibre entre vitalité du centre-ville et emploi. C’est tout l’intérêt de ce projet ! Ce texte est en consultation depuis juillet. Les commentaires de @Paris et des communes sont les bienvenus. Et pas que sur Twitter… – Olivier Klein (@OlivierKlein93) 14 août 2022 Le gouvernement a insisté sur le fait qu’il s’agissait d’un projet de décret temporaire. “C’est un projet élaboré pour recueillir les observations de Paris et d’autres communes.” a confirmé sur Twitter le porte-parole du ministre des Transports, Clément Beaune, qui est également député de la 7e circonscription de la capitale. “Dans les prochaines semaines, le travail d’adaptation du texte et de consultation des parties prenantes va se poursuivre afin de mieux concilier les différents enjeux”, a ajouté la Direction de la Ville et du Logement. De son côté, la ministre des Médias, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, a assuré qu’”elle sera vigilante pour que le développement des “dark shops” ne se fasse pas au détriment du commerce de détails”.