Les parties prenantes interrogées pour cette recherche sont unanimes : il s’agit d’un tournant dans l’opinion publique concernant le verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NCRTM).
Le médecin de la Laurentienne a été identifié au NCRTM en juillet 2011 pour les meurtres de ses enfants de trois et cinq ans. Il avait bu du liquide lave-glace après le crime dans une tentative de suicide.
“Ce n’est pas du tout représentatif de nos patients ou des dossiers d’homicides que nous avons [à l’Institut Philippe-Pinel]. C’est triste, parce qu’on en a beaucoup parlé, mais les gens à qui on a affaire n’ont pas du tout ce profil-là », note la criminologue Sandrine Martin.
Photo par Éric Thibault
confiance ébranlée
Pourtant, cette affaire a frappé l’imaginaire collectif au point d’ébranler la confiance du public dans la justice et de durcir la loi pour y ajouter l’étiquette de prévenu à haut risque en 2014.
« Il y a tout le problème de la crédibilité du processus judiciaire. […] Cela ressemble à une arnaque. Si tu as une bonne défense, tu vas finir par avoir un bonbon, et dans son cas, c’est un peu vrai », explique la professeure de droit Emmanuelle Bernheim.
La Cour d’appel a toutefois ordonné un nouveau procès, après quoi Turcotte a été condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 17 ans.
Plus jamais
“C’était un bouleversement collectif après le premier verdict, les gens étaient traumatisés. […] Comme s’ils se disaient : plus jamais ça [on ne va laisser passer ça]», explique l’avocate pénaliste Véronique Robert.
Un seul meurtrier a été retrouvé au NCRTM par un jury depuis lors, selon nos recherches. Et les circonstances étaient particulières : il était soigné dans le service psychiatrique lorsqu’il a étranglé deux autres patients.
Ce verdict a également été renversé dans plusieurs autres affaires très médiatisées, dont Luka Rocco Magnotta, Richard Henry Bain et, plus récemment au Québec, Carl Girouard.
Certes, des dizaines de meurtriers ont été déclarés NCRTM depuis l’affaire Turcotte, mais toujours après une entente entre la Couronne et la défense.
Assiste-t-on à un durcissement des mentalités ? “Peut-être que ça ne m’étonnerait pas”, répond la professeure de psychologie Suzanne Léveillée.