Qu’il s’agisse de la météo, de la puissance incendiaire du feu ou des moyens humains et matériels impliqués, Landiras 2 va au-delà de tout ce que l’on savait sur les feux de forêt. Avec un chiffre qui semble improbable et que beaucoup ont dû répéter mercredi matin pour le croire : 5.000 hectares brûlés du jour au lendemain. Une nuit d’enfer pour les premiers pompiers impliqués et pour les populations prises dans ce gâchis sans nom. Dans la matinée, nous apprenons également que 17 maisons ont été incendiées, un bilan matériel déjà bien plus important que le premier incendie à Lantira. Mais une fois de plus, les pompiers ont sauvé la chose la plus importante, des vies. “5.000 hectares en une nuit, c’est l’un des incendies les plus pollués qu’on ait jamais vus”, confirme le commandant Matthieu Jomain, porte-parole des sapeurs-pompiers de Gironde. “Nous sommes dans une situation qui pour les anciens peut être comparée à l’incendie de 1949, mais dans l’histoire récente, une situation comme celle-ci est une première. En juillet nous étions déjà dans la surenchère des superlatifs. Aujourd’hui, les mots manquent. »
Des moyens colossaux
Cependant, les pompiers et la population locale n’ont jamais exclu la possibilité d’une autre catastrophe après avoir annoncé que le premier incendie à Lantira avait été rétabli. “Malheureusement, nous étions dans un scénario attendu. Mais ce que nous n’avions pas vécu auparavant en Gironde, c’est cet épisode de températures aussi extrêmes pendant si longtemps sans pluie depuis le premier incendie à Landiras il y a un mois”, a déclaré le général Marc. Vermeulen, patron des pompiers de Gironde.
Végétation desséchée, température supérieure à 40°, humidité inférieure à 20% et l’incendie de Landiras 1 qui ne s’est pas éteint, a été la scène explosive et inédite lorsque le dragon s’est réveillé mardi soir le long de la D 5 à Saint-Magne.
La pénibilité du travail des pompiers est accentuée par la chaleur qui avoisine les 40 degrés.
Fabien Cottereau / SUD-OUEST
Très vite, des équipements colossaux de lutte contre les incendies sont mis au point. Plus de 1 000 pompiers, 250 membres du DFCI, de l’ONF, des rangers, des policiers, des militaires avec de la machinerie lourde, d’innombrables volontaires bénévoles, des agriculteurs, des forestiers, des chasseurs et des ressources aériennes au nombre de six Canadair, deux Dash, deux hélicoptères. Une véritable armée de manœuvres, dirigée par le lieutenant-colonel Chavatte, commandant les opérations de secours pour la Gironde et les Landes.
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Quelques semaines après les incendies qui ont détruit plus de 20 000 hectares de forêt en juillet, la Gironde s’embrase à nouveau en août. Le feu a atteint les Landes dans la nuit de mardi à mercredi. Plus de 6 000 hectares ont été fumés
« On sait manœuvrer des centaines d’hommes au sol, décrypte le commandant Matthieu Jomain. Nous avons une organisation pyramidale qui peut se démultiplier selon la taille du lieu à ce que nous connaissons ici, avec plus de 1 000 sapeurs-pompiers et une structure de commandement qui évolue en parallèle. Cependant, si une telle configuration opérationnelle est abordée dans le cadre de la formation de nos officiers dans des scénarios de formation, nous n’avons nullement déjà effleuré cette réalité. Nous voilà. »
Jamais les pompiers n’avaient tenté avec autant de moyens, sans compter l’arrivée hier d’une aide européenne qui a donné à l’événement une tournure internationale, couverte par des journalistes du monde entier. L’atterrissage des Polonais dans un avion de transport militaire C-130 avec 49 véhicules à l’intérieur a touché une corde sensible. “Ça devient une super production américaine”, sourit un responsable des pompiers, pas mécontent de voir des troupes fraîches prendre la relève des pompiers épuisés.
La base arrière
Dans cette guerre du feu, il y a une autre scène tout aussi disproportionnée, celle de l’état-major, qui s’installe à Hostens, la colonie de vacances du Département qui ressemble désormais à un campement. Le va-et-vient incessant de dizaines de camions lourds revenant du front, des hélicoptères qui atterrissent et décollent sans cesse, des centaines de pompiers ou de militaires qui s’entassent à toute heure du jour et de la nuit, des gendarmes, des officiers de tous les corps. En bordure du périmètre du feu, le campement ordinaire s’est transformé en une imposante base arrière où se décident les stratégies et où les troupes bénéficient d’une petite pause. Ce lundi, le Département de la Gironde entendait y implanter une base de ravitaillement pour les sapeurs-pompiers encore en activité pour éteindre le premier incendie à Landiras. Le deuxième incendie a changé la donne. “Nous sommes passés à une phase industrielle”, a déclaré Jean-Luc Gleyze, président du Département. Plus de 700 personnes s’y sont installées mercredi, plus d’un millier jeudi et 360 sapeurs-pompiers européens de plus ont rejoint les rangs depuis jeudi après-midi. Tout ce beau monde y mange, y dort. Il sert maintenant 2 000 repas à chaque service. De nombreux bénévoles et une trentaine d’agents, issus des services du domaine ou du département, s’occupent des pompiers, répandant des milliers de sandwichs ou leur fournissant tout ce dont ils ont besoin : des brosses à dents, des beignets, des boissons gazeuses ou des barres de céréales, une bière fraîche et bientôt de l’anti-moustique. “Et à ce stade, nous sommes dans une phase sans précédent. C’est un effort de guerre décisif pour maintenir le moral des troupes », se félicite le commandant Jomain.