C’était censé être un triomphe humanitaire : le grain ukrainien a rompu cinq mois d’un blocus naval russe pour alimenter le Moyen-Orient et l’Afrique. Mais le Razoni, premier navire de l’armada, a soulevé des doutes sur la reprise du trafic maritime vers et depuis l’Ukraine. Le navire, qui a quitté le port d’Odessa le 1er août grâce à un accord tripartite entre la Russie, l’Ukraine et la Turquie sous l’égide des Nations unies, et son affréteur font en effet face à de sérieux revers dans les échanges qui pourraient également être partagés par des dizaines de céréaliers. agriculteurs partis dans son sillage. Lire aussi : L’article est destiné à nos abonnés A Istanbul, un accord sur l’exportation de céréales ukrainiennes et russes dans la bonne foi de Vladimir Poutine
Dans la soirée du mercredi 10 août, le cargo battant pavillon de la Sierra Leone a accosté pour la première fois à Mersina, en Turquie, après quatre jours de croisière dans les eaux au large de Chypre. Pour finir par ne livrer que 5 % des 26 527 tonnes de maïs qu’elle transporte à un acheteur turc. Le Razoni devrait en principe reprendre la mer pour décharger sa cargaison restante en Égypte, a déclaré à Reuters le directeur de la société de transport turque Toros Lojistik Kargo. Ce n’est qu’une supposition, car Toros ne s’est occupé que de la livraison au port de Mersina.

“Problème de qualité”

Tout allait bien jusqu’à ce que le céréalier traverse le Bosphore pour entrer dans la mer Egée. Un comité d’accueil, organisé par l’ambassade d’Ukraine au Liban, attendait le navire le 7 août au port de Tripoli pour une opération de communication à destination des acheteurs de céréales et du grand public. Mais l’acheteur initial de la cargaison, une société libanaise, a soudainement fait faillite, malgré le besoin pressant de céréales dans ce pays. Après quelques jours d’incertitude, l’ambassade d’Ukraine au Liban a finalement publié un communiqué de presse expliquant pudiquement que le délai de cinq mois – dû au blocus – entre le chargement du grain et la livraison avait « incité l’acheteur et le « chargeur à d’accord sur l’annulation de la commande”. Tout se passe comme si l’acheteur, le premier intéressé, découvrait soudain le retard de livraison alors que l’attention du monde était focalisée sur le bateau. Des rumeurs ont circulé, notamment sur d’éventuelles pressions russes sur l’acheteur libanais. Lire aussi : L’article destiné à nos abonnés Les prix du blé chutent après l’accord d’exportation des céréales vers la mer Noire
“Je ne pense pas que ce soit une pression politique. L’explication est plus terre-à-terre”, explique Andrey Sizov, consultant SovEcon et expert du marché des céréales autour de la mer Noire, au Monde. “C’est un problème de qualité du maïs, qui est resté cinq mois dans les cales du navire, alors que le délai maximum est d’un mois. Le maïs se détériore rapidement, développant des mycotoxines et rendant la cargaison impropre à la consommation, même s’il s’agit d’aliments destinés aux animaux et non aux humains. Peut-être a-t-il déjà été échantillonné ? Avant de quitter les eaux de la mer Noire, le Razoni a été inspecté conjointement par des Turcs et des Russes, selon l’accord tripartite. Il vous reste 40,76% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.